Quelques années après être rentrée en France, encouragée par Gilbert Lascault, j’ai repris, la mémoire en plus, le journal de travail que je tenais là-bas, de 1982 à 1989, ainsi que mes notes d’observations lorsque j’étais dehors.
Dans l’urgence, j’observais pour écrire, décrypter, dégager des structures logiques de fonctionnement tant ce lieu me paraissait étrange, fermé… de l’informe mystérieux… c’était en somme, une pratique d’édification d’un moi égyptien, et, à travers cette connaissance-là, en même temps, édification du moi-peintre, car je pressentais que j’allais tirer de cette expérience unique, mes propres fondements plastiques déterminants.
TEMPLE DE MOUT
Je me suis remise à la série des petits blocs à usage sacré que je trouve un peu partout dans les enceintes des temples ; des bassins, des stèles, des meules, des mortiers, des râpes, et toujours des tables d’offrandes.
Et la peau des ânes qui, dès les premières chaleurs, striée par la coupe des ciseaux, ressemble aux pierres des temples … comme s’ils étaient des ébauches de statues !
J’ai sous les yeux un monde obscur, étincelant, qui rayonne, qui donne une impression de combustion, comme une braise sous la cendre.
Les statues du temple de Mout cristallisent autour d’elles un ensemble complexe fait de chaleur, lumière, reflets, limon, vide, coupure, violence , dans l’organisation générale du site. Chaque élément renvoie aux autres.